Le programme MATCH du GIFEN : "Un catalyseur pour la relance du nucléaire en France"

Le programme MATCH s'inscrit dans la perspective d'une relance du nucléaire en France conformément au cap fixé par le président de la République à Belfort début 2022. C'est l'un des programmes industriels les plus importants pour notre pays depuis 50 ans, avec en prévision plus de 10 000 recrutements par an dans les 10 années à venir. Christophe Neugnot, Directeur de la communication externe et des relations institutionnelles du Groupement des Industriels Français de l'Energie Nucléaire (GIFEN) nous explique en quoi ce programme nous offre une vision structurée de la filière à 10 ans ou comment faire matcher les besoins et les ressources du nucléaire en France ?

Pouvez-vous nous expliquer les enjeux de ce programme MATCH ?

En février 2022, Emmanuel Macron a fixé un nouveau cap pour la filière nucléaire, pour répondre aux enjeux climatiques, de souveraineté énergétique et de réindustrialisation. Ont été annoncées entre autres, la construction de 6 réacteurs « EPR2 », la mise à l’étude de 8 réacteurs additionnels et un soutien à l’émergence de petits réacteurs modulaires. Cette relance d'un programme nucléaire, en parallèle des travaux liés au « grand carénage » exige une efficacité collective de la filière et la disponibilité des ressources humaines au bon niveau de compétence et au bon moment. Dans ce cadre, le rapport MATCH remis par le GIFEN à la ministre de la Transition énergétique et au ministre délégué chargé de l’Industrie, détaille « les capacités et besoins de la filière nucléaire ». MATCH résulte d’un travail initié en 2020. Plus de 100 entreprises de la filière (exploitants nucléaire, fournisseurs) et organisations professionnelles sectorielles y ont contribué. 20 segments d'activités opérationnelles tels que l'ingénierie, le génie civil, les essais et contrôles ou encore la chaudronnerie-tuyauterie-soudage et leurs 84 métiers significatifs ont ainsi été étudiés… Un outil structuré et collaboratif pour prévoir ses besoins en compétences et en ressources industrielles, et pour orienter les actions nécessaires à l’adéquation de ses capacités. Ce qu’il faut retenir de ce programme, c’est avant tout une augmentation très nette du volume de travail de l’ordre de 25% pour les métiers cœur. Il s’agit ici de métiers du génie civil, de l'électricité, de la chaudronnerie, de l’ingénierie, etc. Cela représente environ 60 000 recrutements, soit 30 000 pour remplacer les départs en retraite et 30 000 pour palier l’augmentation de la charge de travail. Une fois ce constat établi sur ces nouveaux besoins de la filière, nous avons identifié pour cela 3 leviers d’action.

Pouvez-vous nous en dire plus sur ces leviers d’action ?

Le premier est de travailler sur les ressources et l’attractivité de la filière. Dans ce cadre, Il y a donc un plan compétences qui a été mis en place par l'Université des Métiers du Nucléaire avec la création du site www.monavenirdanslenucleaire.fr, la valorisation de la « semaine des métiers du nucléaire » qui a proposé plus de 230 événements pour découvrir les métiers, les entreprises et les formations et un partenariat très fort avec France Travail (Ex Pôle emploi) qui propose plus de 11 000 offres dans le secteur du nucléaire et ce du CAP au bac +5.  Le GIFEN y contribue en travaillant sur le développement du compagnonnage. Grâce à l’accompagnement de salariés expérimentés, on peut ainsi favoriser la montée en compétence de ceux qui arrivent dans la filière dans certains secteurs pointus tels que la forge-fonderie, le contrôle-commande, l’électricité, le génie civil, le process nucléaire, la chaudronnerie et l’évacuation d’énergie. Les bons gestes et les bonnes méthodes seront ainsi transmis dans un souci d’amélioration avec comme objectif final : participer à la performance industrielle et économique du nucléaire. 

Ce qui m’amène directement au deuxième levier qui concerne la performance opérationnelle. C’est très bien d’avoir des ressources supplémentaires, encore faut-il qu’il y ait en face une excellence opérationnelle en matière de qualité, de sureté, etc. Par exemple : Comment faire bien du 1er coup ? Car refaire une pièce ou une intervention est couteux en temps et donc économiquement. Il est donc nécessaire de travailler sur une simplification des process, qu’ils deviennent plus efficaces et donc moins couteux. 

Enfin, le troisième levier porte sur la capacité économique et financières des entreprises à mener des projets. Comment s’assurer que l’ensemble des entreprises de l’écosystème soient robustes financièrement ?  Pour rappel, la filière, c’est 500 entreprises directement liées au nucléaire et 3000 entreprises qui gravitent autour, ce qui représente environ 220 000 emplois. Donc l’objectif est de travailler sur la relation contractuelle qui aboutisse à un juste partage de la performance mais également développer les partenariats en Europe et aussi avec d’autres secteurs industriels

 Le GIFEN s’attache à permettre à la filière de travailler sur ces leviers. Il poursuit ainsi la conduite du programme MATCH dont une mise à jour sera réalisée chaque année, la prochaine ayant lieu l’été prochain, afin de continuer à affiner les résultats, à approfondir les actions collectives de mobilisation de la filière et à en traiter les conditions de réussite avec ses parties prenantes.

Contrairement à de nombreux pays, nous avons en France une filière nucléaire complète. Nous construisons des réacteurs, nous sommes capables de les exploiter, d’avoir des usines sur l’ensemble du cycle du combustible et aujourd’hui, la capacité de développer des mini- réacteurs innovants. Avec ce nouveau programme nucléaire, la France se dote d’un atout pour  développer une économie bas carbone, renforcer sa compétitivité industrielle, garantir la pérennité de son expertise technologique tout en en assurant sa souveraineté énergétique pour les décennies à venir.